Interview des Ambassadeurs de Cuba, du Venezuela et de la Bolivie

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Etaient présents :

S.E. M. Orlando Requeiro Gual, Ambassadeur de Cuba en France,
S.E. M. Jesùs Arnaldo Pérez, Ambassadeur du Venezuela en France,
M. Tupac A. Soriano Perez, Chargé d’Affaires à l’Ambassade de Bolivie en France,
M. Leyde Rodriguez Hernandez, Conseiller politique à l’Ambassade de Cuba en France,
Mme Magali Giovannangeli, Présidente de la Communauté d’Agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Etoile,
M. Eric Svoboda, Directeur du Service Tourisme et Relations Internationales,

Propos recueillis par :
Michel Taupin, Cuba si France
Gérard Germain, Cuba Si France
Rose-Marie Bossard, Cuba Linda

Interview

Cuba Si France : Comment envisagez-vous le devenir de l’ALBA ?

S.E. M. Orlando Requeiro Gual (Cuba) : Au départ, en 2004, il s’est agi d’un accord bilatéral entre  deux pays : Cuba et le Vénézuela, puis il est devenu  multilatéral avec huit pays qui ont leurs caractéristiques propres. Ce groupe de pays d’Amérique latine et des Caraibes a décidé de se rassembler pour  un développement avec pour objectif  le bien être de la population, y compris de ceux qui vivent dans les conditions le plus difficiles.

Tous les projets de l’ALBA ont pour but d’améliorer les conditions de vie des citoyens non seulement des états membres mais aussi d’autres pays car l’objectif est d’inclure et surtout de ne pas exclure. L’accord est toujours en train de grandir, sans but lucratif, mais avec un principe de fonctionnement  participatif, de coopération. L’ALBA va devenir un groupe très important en Amérique latine et dans les Caraïbes. Beaucoup d’autres pays en effet, souhaitent bénéficier des solutions proposées par l’ALBA. Dans l’ALBA, il n’y a pas la volonté d’un pays d’imposer ses vues aux autres participants. On a décidé d’agir en complémentarité.

Aujourd’hui, nous pouvons non seulement parler de projets communs mais de réalisations communes. Ce n’est pourtant pas simple, c’est même difficile, mais possible grâce à  l’appui des peuples, de la population, car la démocratie, telle qu’elle a été définie à l’origine, c’est le pouvoir du peuple, pas celui des élites et la participation active de la population.

S. E. M. Jesùs Arnaldo PEREZ (Venezuela) : J’adhère à ce que vient de dire Orlando sur l’ALBA. A la question que va devenir l’ALBA ? Je suis optimiste, même si nous rencontrons quelques difficultés pour travailler avec d’autres pays, car le temps politique n’est pas encore arrivé aujourd’hui. L’ALBA va pourtant se renforcer, même si aujourd’hui toute l’Amérique latine et les Caraïbes ne sont pas encore prêtes mais l’alliance a les moyens d’accepter d’autres pays qui sont à sa périphérie. On n’a pas besoin de concerner toute l’Amérique latine. La preuve que l’on ne se trompe pas, c’est que les décisions et les actions sont populaires et les gouvernements reconduits à chaque élection.
Le 25 mai va se dérouler à Paris un débat au Sénat sur les opportunités économiques auquel pourront participer les entreprises internationales. L’ALBA, c’est aujourd’hui 75 millions d’habitants donc un marché important pour les entreprises capitalistes qui sont prêtes à faire des efforts pour contourner le blocus,  même si bien sûr ces entreprises ne travaillent pas pour le développement des peuples. Par exemple, ALCATEL a passé un accord pour la pose d’un câble sous-marin entre Cuba et le Venezuela. Si la France décide d’investir, l’ALBA est une opportunité qui a une réelle signification économique. Notre seul  principe, c’est que le meilleur gouvernement est celui qui apporte les meilleures garanties sociales au peuple et le meilleur aux gens selon ce que disaient Bolivar et Marti.

Aujourd’hui l’ALBA c’est une opportunité, une puissance économique importante. Les échanges pour satisfaire les besoins des habitants commencent à se faire sentir.

Cuba Si France : vous sentez-vous assez forts et capables de réussir ?

S.E. M. Jesùs Arnaldo PEREZ  (Venezuela) : l’ALBA est forte, il nous faut un peu de temps, mais je suis optimiste, nos gouvernements sont là pour durer.

Mme Magali Giovannangeli (Présidente Agglomération) : C’est Cuba et l’ALBA qui ont permis au monde de comprendre que l’on peut dire non aux USA, non à la charité et oui à la solidarité.

M. Tupac Soriano Perez (Bolivie):  Ce processus n’est possible que parce que les pays sont indépendants et souverains. C’est aussi la reconnaissance des différents états. Par exemple, la Bolivie, c’est 36 cultures différentes entres les langues et les religions. Ce qui est intéressant dans l’ALBA, ce sont les complémentarités. Riches de nos diversités, grâce au respect et aux objectifs communs, c’est-à-dire  les besoins du peuple, avec notre approche originale du pouvoir et le conseil des mouvements sociaux, nous allons réaliser une communauté qui, face au capitalisme, sera capable de se développer sans exploiter les autres. La participation populaire est particulièrement vitale.

S.E. M. Jesùs Arnaldo PEREZ (Venezuela) : Nous sommes sincères, et nous n’avons pas de préjugés.
L’ALBA est un espace de liberté parce que les nations sont libres. C’est un espace social, économique, un espace de justice, et la démocratie participative va s’y déployer. L’ALBA va se renforcer, d’autres pays vont venir. Nous souhaitons que des pays africains puissent également rejoindre l’ALBA et entrer ainsi dans cette dynamique. La Guinée Conakry par exemple, s’intéresse beaucoup à ce que nous faisons.

Il n’y a pas d’autre alternative, même si les tentatives de la briser sont fortes, l’ALBA se développe sur les cendres de l’ALCA (*) et il nous faut un peu de temps pour l’imposer et la consolider.

            « Ou nous inventons ou nous errons ! » disait Simon Rodriguez, le professeur de Bolivar.

(*) ALCA Zone de Libre-échange (Amérique Latine et Caraïbes) initiée par les E-U

Cuba Si France : La fête du Soleil à Aubagne, c’est quoi pour vous ?

S.E. M. Orlando Requeiro Gual (Cuba) : C’est la 7ième édition de la Fête du Soleil à Aubagne. Elle a lieu tous les 2 ans. Cette année, on nous a proposé de présenter l’ALBA. En France, on ne connaît pas l’ALBA, on la présente toujours de telle façon que l’on ne puisse pas comprendre.

Notre présence à Aubagne est une opportunité qui nous permet d’expliquer qu’ un autre monde est possible, et que nous sommes en train de le bâtir.

Nous utilisons toutes les occasions pour présenter notre travail, nos expériences et rapprocher les gens. A Aubagne, nous avons échangé pendant près de 2 heures avec la population, les élus et les associations. Le dialogue a été très productif, avec un public attentif, curieux, d’origines très diverses (français, latino-américain, portugais etc…), tout cela dans un espace d’expression très libre. Depuis une semaine, avec l’appui des organisateurs, mais aussi des associations de soutien à Cuba, comme  Cuba si France et Cuba Linda, de la Bolivie, et d’autres encore, Aubagne est le cœur de l’Alba en train de battre.

C’est la première fois en France que nos 4 pays (Bolivie, Cuba, Equateur et Venezuela) présentent ensemble l’ALBA, dans un endroit ou il y a à la fois, un grand respect et des alternatives intéressantes. Nous remercions Eric Svoboda de nous avoir permis de le faire. Pour nous, il était très important d’être présents à Aubagne qui vient de lancer la gratuité des transports dans l’agglomération. C’est une idée que nous partageons, mais qu’actuellement nous ne pouvons satisfaire, car nos priorités sont l’école et la santé, mais c’est sûr, nous reprendrons cette idée.

Il n’est évidemment pas question d’imposer un modèle, on vient juste raconter ce qui est réalisé, ainsi peut-on apprendre ensemble à éviter les erreurs, les faux pas. Nous allons répandre la semence de l’ALBA.

S.E. M. Jesùs Arnaldo PEREZ (Venezuela) : J’attendais d’être dans la région de Marseille pour exprimer l’Alternative Bolivarienne. Nous voulions un endroit pour présenter une alternative au colloque de Biarritz organisé par la droite, car je crois beaucoup à la force de la France qui s’est battue pour la gratuité de l’école, pour une énergie indépendante, pour le rôle des entreprises publiques.  A Aubagne, les conditions sont réunies.

On doit prendre date et que ce lieu devienne un véritable repère, un endroit où l’on pourra échanger sur cet autre monde possible. C’est un terrain favorable.

            La fête du soleil, c’est aussi l’ALBA , l’AUBE.

Cuba Si France : Merci Madame, merci Messieurs. Avec l’Aube, le jour se lève…

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