Le ministre de la culture de la République de Cuba, Abel Prieto, a donné le matin du 10 octobre une conférence de presse au Press Club Brussels Europe dans laquelle il a expliqué les détails de sa visite en Belgique. Il a offert des réflexions intéressantes sur le rôle de la culture dans la société cubaine.
L’ambassadrice Norma Goicochea Estenoz, chargée de présenter l’événement, a souligné l’importance de pouvoir compter sur la présence d’un ministre cubain, puisque comme elle l’a remarqué, il n’est pas fréquent que les institutions européennes reçoivent la visite de diplomates ou de membres du gouvernement cubain. En effet, a-t-elle poursuivi, les institutions européennes ont plutôt tendance à laisser beaucoup d’espace aux visions biaisées de la réalité cubaine et, dans ce contexte, la visite d’un ministre du gouvernement cubain est un événement exceptionnel, qu’il faut savoir valoriser sans réserve.
La visite du ministre Abel Prieto a été organisée par le groupe parlementaire de gauche GUE-NGL (Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique), dans le cadre d’un programme de coopération internationale qui a pour objectif de faire connaître et de montrer la réalité de Cuba au sein des institutions européennes et, ce faisant, de pouvoir contribuer à la levée du blocus que subit l’île.
L’ambassadrice Norma Goicochea Estenoz a profité de l’occasion pour présenter le programmes des activités de la Semaine de la culture cubaine en Belgique, qui se tient cette année entre Bruxelles et Gand. Après avoir présenté l’agenda des activités, l’ambassadrice a laissé la parole à Abel Prieto. Le ministre de la culture a commencé par rappeler que le jour de la culture cubaine est fêté le 10 octobre afin de commémorer l’éclatement de la première révolution, qui a eu lieu à Cuba en 1868.
Prieto a également cité une phrase de Fidel Castro pour faire connaître le rôle remarquable de la culture dans la société cubaine, une phrase qui retentit dans l’esprit et dans le cœur des Cubains, faisant office de porte-bonheur qui donne de la force au peuple cubain lorsqu’il en a le plus besoin : « La culture est la première chose qu’il faut sauver ».
Les mots de Fidel que le ministre a repris ont servi à expliquer la situation difficile que connaît l’île après le passage du cyclone Irma. « Nous sommes dans une période difficile, avec Trump et le passage de l’ouragan, et dans cette période difficile, le rôle de la culture est plus indispensable que jamais », a déclaré le ministre. Malgré les énormes dégâts matériels provoqués par le cyclone, les Cubains ont pu sauvegarder tant le patrimoine artistique des musées que le patrimoine des centres d’éducation et de recherche.
Parce qu’à Cuba, la culture est un aspect qui fait partie de l’existence même, elle n’est pas considérée comme une babiole, un accessoire ou un objet de luxe comme peut la concevoir le capitalisme. À Cuba, comme l’a indiqué Prieto : « les questions culturelles ne passent pas après les questions matérielles, mais elles vont ensemble ».
C’est en sens que le ministre a raconté l’expérience, assez émouvante, qui a eu lieu après le passage de l’ouragan : des artistes, des musiciens, et des acteurs cubains, engagés avec leur propre peuple, ont réalisé une tournée dans les endroits les plus touchés par l’ouragan. Et après leur visite, les personnes affectées, qui avaient tout perdu, les ont accueillis avec beaucoup de tendresse et une reconnaissance énorme pour avoir partagé avec elles leur solidarité, leur amitié et leur force dans un moment aussi difficile.
Malgré la force destructrice de l’ouragan, Cuba a tenu bon et a continué à bâtir la culture et, comme l’a relevé le ministre, la programmation culturelle, au prix d’efforts gigantesques, ne sera pas affectée. Certains événements ont déjà pu avoir lieu, comme la « Casa Tomada » à la Maison des Amériques, le festival de rock Patria Grande et on espère que les événements les plus importants de la culture cubaine que sont le festival de cinéma, le festival de ballet et la Foire du Livre se dérouleront de façon tout à fait normale, même si cela sera très difficile.
Après avoir dressé le bilan de la situation cubaine, le ministre a proposé des réflexions intéressantes sur le rôle de la culture dans la société cubaine, et surtout dans le nouveau contexte d’actualisation du modèle économique. « Nous allons continuer à faire de notre culture une culture de la résistance », a expliqué Prieto. Il a également précisé que la culture à Cuba a été, et doit continuer d’être « quelque chose de vivant. La culture et le patrimoine ne peuvent pas être quelque chose d’archéologique, de contemplatif ou de froid qui se retrouverait dans une étagère. La culture doit être vivante ».
De la même manière, il a insisté sur le rôle remarquable que joue l’éducation dans la société cubaine. L’éducation, a-t-il déclaré, « met l’être humain au centre du monde, face au modèle néolibéral dans lequel l’éducation fonctionne comme une usine de spécialistes au service des firmes ».
Alors que dans le système capitaliste les indicateurs de croissance se mesurent à partir de pourcentages froids et de statistiques qui, en réalité, occultent de grandes cruautés, et où l’être humain est considéré comme une froide somme de statistiques, à Cuba l’être humain est placé au centre et on essaie de répondre à tous ses besoins matériels, mais aussi culturels.
Face au modèle néolibéral, où les individus solitaires sont en concurrence et s’écrasent mutuellement, à Cuba, « le bonheur est un projet de vie collectif », a déclaré Prieto. Le ministre a terminé son intervention en rappelant une autre phrase célèbre de Fidel : « Le meilleur antidote face au consumérisme est la culture ».
Source : Journal de Notre Amérique
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