CUBA
Nouvelles mesures et politique des Etats-Unis
Iroel Sánchez. La pupila insomne.
Les Départements du Trésor et du Commerce des États-Unis ont annoncé le 16 mars un volet de mesures (1) qui modifient les sanctions économiques contre Cuba, le quatrième depuis la mise en route le 17 décembre 2014 d’un processus de nouvelles relations. Il s’agit aussi d’un tapis rouge que le président Obama déroule sous ses pieds à la veille de sa visite à Cuba.
Dorénavant, les Etatsuniens ne seront plus obligés de voyager en groupe et leur flux va augmenter puisque les liaisons aériennes sont rétablies. Les douze catégories de personnes autorisées à voyager ne sont pas étendues et la loi maintient l’interdiction de faire du tourisme. Les voyageurs devront se consacrer « à temps complet à des activités éducatives destinées à améliorer le contact avec le peuple cubain, à appuyer la société civile ou à promouvoir l’indépendance du peuple cubain vis à vis des autorités de leur pays ». Ils devront conserver toute documentation liée aux transactions de leur voyage et « la part essentielle de leur activités » ne devra pas être passée en compagnie de « certains fonctionnaires du gouvernement ou du parti communiste de Cuba ».
LIBERTES RESTREINTES POUR LES ETAUNIENS
Cette avancée augmentera le nombre de voyageurs étasuniens dans l’ile et les revenus qui en découlent. Il s’agit aussi d’un pas limité vers la liberté des Étasuniens. Si jusqu’à présent, les visiteurs devaient être chaperonnés par des agences de voyage, ils pourront désormais s ‘auto-contrôler à condition de conserver les preuves de leur activité. Une liberté surveillée donc, afin de garantir que chaque voyageur se comporte comme un agent de la politique « de changement de régime » et ne se laisse pas contaminer par le communisme en fréquentant «certains fonctionnaires ». Il s’agit de promouvoir « l’indépendance du peuple cubain vis à vis des autorités du pays » mais celle du peuple nord-américain est singulièrement restreinte.
Les citoyens cubains, ayant un statut de non immigrant aux États-Unis ou qui attendent une autorisation de voyage comme non immigrant, pourront percevoir un salaire ou une compensation à l’égal des autres citoyens étrangers. Cela à condition qu’ils ne payent « aucun impôt spécial au gouvernement cubain » et que leurs employeurs « ne versent aucune somme supplémentaire au gouvernement cubain pour la mission concernée ». La mesure supprime une discrimination qui frappait les spécialistes, artistes et athlètes cubains mais elle interdit que le pays qui les a formés reçoivent un centime susceptible de consolider le système qui a permis de développer les talents.
Les Etasuniens pourront désormais consommer des produits et recevoir des services cubains dans un pays tiers mais pas aux États Unis et « ils ne pourront pas importer ces marchandises » chez eux. Ils pourront passer la frontière du Canada, y boire un rhum Havana Club tout en fumant un Cohiba mais, à leur retour, adieu le plaisir.
LE DOLLAR AUTORISE
Les transactions de fonds procédant d’une banque située dans un pays tiers et qui transitent dans une ou plusieurs banques nord-américaines avant d’être transférées à une banque hors des États-Unis sont autorisées « quand l’émetteur et le bénéficiaire ne relèvent pas de la juridiction des États-Unis ».
Les banques étasuniennes sont autorisées «à traiter en dollars des instruments monétaires présentés indirectement par des institutions financières cubaines » et les « comptes ouverts dans des institutions financières de pays tiers pour réaliser ces transactions pourront l’être en dollars ».
Ces mesures sont les plus importantes : elles supposent que cesse la traque financière des transactions cubaines qui a atteint des records durant l’administration Obama. Elles devraient éliminer les obstacles qui ont entravé l’application des mesures antérieures, par exemple les accords entre entreprises de télécommunications et compagnies aériennes.
Par contre, « les banques relevant de la juridiction nord- méricaine ne sont pas autorisées à ouvrir des comptes pour les banques nationales de Cuba » bien qu’elles soient « autorisées à ouvrir et maintenir aux États-Unis des comptes individuels afin que des citoyens cubains reçoivent et transfèrent à cuba les salaires correspondant à des transactions autorisées ».
« L’autorisation de présence physique » est élargie afin d’établir et maintenir une activité commerciale à cuba avec filiales, succursales, magasins, franchises, contrats et autres formules avec des personnes ou des entités cubaines afin de faciliter les prestations des télécommunications autorisées, des services internet. Tout comme celle des entités qui participent à des « projets humanitaires autorisés , entités qui participent à des activités non commerciales autorisées, destinées à apporter un appui au peuple cubain, aux activités autorisées des fondations privées et instituts de recherche ou d’éducation ».
Autres autorisations « l’importation de software d’origine cubaine », celle accordée aux bateaux qui transporteront un chargement autorisé entre les États-Unis et Cuba avant de livrer le reste de la cargaison à d’autres pays. On adoptera « une politique de révision au cas par cas pour examiner les exportations et réexportations d’éléments susceptibles de permettre et de faciliter les exportations d’articles issus du secteur privé cubain ».
Afin « d’appuyer des projets éducatifs et de permettre l’aide des États-Unis à des travaux philanthropiques, bourses et subventions seront provisionnées afin « d’appuyer des projets éducatifs, des travaux philantropiques ainsi que les projets humanitaires autorisés dans les règlements de l’OFAC » (officine de contrôle des actifs étrangers relevant du Trésor).
L’autorisation de l’usage du dollar dans les transactions internationales de Cuba représente une victoire à mettre au crédit de la persévérance de Cuba et elle démontre que la mesure aurait pu être adoptée parmi les premières annoncées en janvier 2015. En général, le reste des mesures vise à transformer en autoroute le chemin muletier par lequel transitait jusqu’alors l’appui à l’émergente classe moyenne que les États-Unis considèrent comme instrument privilégié de leur politique. Le sous-secrétaire d’État Anthony Blinken s’est clairement exprimé là dessus dans une interview au quotidien El Pais.
On relèvera l’intérêt porté à l’usage des technologies de l’information et des télécommunications. Bien que pour l’essentiel, le siège soit maintenu autour de l’État cubain, bien qu’elles visent à favoriser ceux que Washington entend associer à sa politique d’ingérence, ces décisions exécutives offrent cependant de nouvelles opportunités. Intelligemment utilisées, elles pourront fournir des revenus supplémentaires afin de renforcer l’économie cubaine au bénéfice de tout le peuple.
Traduction Maïté Pinero
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